Première partie de la troisième séance de la série de séminaires Genre(s) et méthodes co-organisée par le LabSIC (Laboratoire des Sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris Nord, France) et le CRICIS (Centre interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, Québec, Canada).
La troisième séance, intitulée « Méthodologies et décolonisation : enjeux, débats et outils», a eu lieu le vendredi 21 mai 2021 entre 9h et 12h (15h-18h à Paris). À cette occasion, nous avons reçu en première partie Sandeep Bakshi, maître de conférences en études anglaises à l’Université Paris et en deuxième partie Naïma Hamrouni, professeure au département de philosophie et des arts de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Seule la première partie a été filmée.
Résumé de la communication filmée
Sandeep Bakshi: «Queeritude décoloniale. Quels objets, quelles possibilités?»
Visant à ouvrir le champ décolonial et les études queer aux possibilités d’une lecture croisée, cette présentation prend appui sur deux théories, deux analytiques véritables d’études critiques œuvrant pour la transformation des relations sociales tout en relevant l’absence d’articulation d’un cadre de queeritude décoloniale. Il convient de souligner que les deux outils théoriques ne peuvent s’ignorer pendant longtemps car même si les deux champs de recherche demeurent rigoureusement disciplinaires, voire disciplinés, les possibilités de croisement restent souvent nombreuses et mal exploitées. Situant les questions sur le positionnement éthique de la recherche et les objets de recherche dans le cadre épistémologique, l’exemple phare de cette présentation tend vers une analyse géo-culturelle, aspirant à formuler une critique du mouvement queer indien dominé par l’élite et la langue anglaise – une des six langues impériales dans le monde, selon les études décoloniales. En se décentrant de la langue anglaise, cette recherche amende l’équilibre des pratiques culturelles queer indiennes de façon à renouveler la problématique queer dans la région. Cette approche interdisciplinaire embrasse à la fois les grilles de lecture établies par les théories queer et décoloniales dans le but de proposer des outils pour une critique décoloniale des énonciations transnationales de queeritude.
Biographie: Sandeep Bakshi est maître de conférences en études queer et postcoloniales à l’Université de Paris. Ses recherches portent sur l’énonciation transnationale queer et décoloniale des savoirs. Suite à son doctorat à la School of English, University of Leicester, Royaume Uni, il a travaillé à l’Université du Havre. Il a co-dirigé ‘ouvrage Decolonizing Sexualities: Transnational Perspectives, Critical Interventions (Oxford: Counterpress, 2016) et un numéro spécial de la revue Interventions, intitulé « Decolonial Trajectories » en 2020. Ses publications s’articulent autour des problématiques queer et raciales dans les littératures et cultures postcoloniales.
À propos de la série de séminaires
Co-organisé par le LabSIC (Laboratoire des Sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris Nord, France) et le CRICIS (Centre interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, Québec, Canada), le séminaire Genre(s) et méthodes (GEM) s’attache à étudier les questions féministes, intersectionnelles et de genre(s) en termes de méthodes, méthodologies et épistémologies. Concept transdisciplinaire fluide et non figé, le genre – ou les genres, pour échapper à un fonctionnement social binaire – a fait l’objet de travaux qui, en proposant un décentrement radical, ont transformé le paysage des sciences sociales et humaines tout au long du XXe siècle. Ce séminaire a pour objectif de proposer un espace pour discuter des apports de ces études à la pratique scientifique. Nous y discutons des façons de faire de la recherche lorsqu’on travaille sur le(s) genre(s), de ses / leurs articulations avec d’autres formes de minoration, et du pouvoir critique de cet outil pour désessentialiser le monde social. Cherchant à soustraire la réflexion à la pensée universaliste, nous y décentrons les regards pour aborder les questions de luttes, de résistances, à l’exemple de celles de corps racisés qui subissent différents rapports de domination. Nous réfléchissons à la façon dont sont opérés les décentrements des concepts et aux démarches mises en œuvre pour déconstruire les normes dominantes sur les identités de genre, les sexualités et d’autres rapports de pouvoir comme la classe ou la race. Pluriels, les questionnements portent sur la capacité à penser le positionnement de la chercheuse ou du chercheur, son engagement, sa subjectivité, le dévoilement de biais en termes de production ou d’interprétation de données, la réflexivité sur ces biais en tant que ressources heuristiques, épistémiques ou politiques, les questions éthiques soulevées par des objets perçus comme impurs, ou encore l’historiographie ou l’analyse du caractère genré d’un objet ou d’un dispositif d’enquête… Il s’avère pertinent de mettre au jour et d’analyser les façons dont le(s) genre(s) – ainsi que les concepts qui lui / leur sont rattaché(s) – sont travaillés et reconstruits par le terrain… Enfin, cet espace de dialogue a aussi pour vocation d’interroger la possible singularité des méthodes, méthodologies et épistémologies des approches par le genre et des études féministes et intersectionnelles. Ce séminaire met en lumière des travaux s’inscrivant dans les champs des médias et de la communication, et plus largement en sciences humaines et sociales (sociologie, histoire, anthropologie, sciences politiques ou philosophie…).
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