La première rencontre de la saison 2022-2023 du séminaire GEM : Genre(s) et méthodes, co-organisé par le LabSIC (Laboratoire des Sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris Nord, France) et le CRICIS (Centre interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, Québec, Canada), au eu lieu sur zoom le vendredi 14 octobre 2022 entre 9h et 12h (15h-18h à Paris).
À cette occasion, nous avons accueilli Élodie Simard, doctorante en communication à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), ainsi que Jessica Benonie, docteure en sociologie et chercheure associée au LISST Cers (Université Toulouse 2). La présentation peut être visionnée ici:
Résumés des communications
Jessica Benonie: Enjeux et points de tensions dans l’étude du genre et des jeux vidéo en France
L’ouvrage « Genre et jeux vidéo » (Lignon, (sous la dir. de), 2015) issu du premier colloque éponyme et spécialisé sur le sujet en 2012 semble avoir ouvert la voie dans l’étude des rapports de domination au sein de la première pratique culturelle des français×e×s. Depuis, à un niveau pluridisciplinaire, les enquêtes et analyses sur le genre et les jeux vidéo sont de plus en plus présentes (Andlauer, 2019 ; Benonie, 2019 ; Coville, 2014, 2016). Après la présentation d’un panorama des analyses disponibles et en s’appuyant sur les enseignements de ce récent héritage, cette communication propose d’identifier des pistes de réflexions et les points de tensions qui demeurent autour du duo genre et jeux vidéo. Il s’agit de mettre en dialogue les approches existantes et d’identifier à la fois les enjeux méthodologiques et les points de crispations que posent une spécialisation dans cette thématique de recherche.
Élodie Simard: Enjeux épistémologiques et méthodologiques pour une étude des représentations vidéoludiques
Étant donné leur nature interactive, les jeux vidéo ne peuvent être pensés indépendamment des joueurs et joueuses. En effet, le jeu est une « activité vécue » qui existe dans l’expérience du joueur ou de la joueuse (Bonenfant, 2015). Le discours des fans de Tomb Raider quant au personnage de Lara Croft soulève des éléments laissant croire que les représentations n’ont pas nécessairement l’impact présumé par certaines recherches. L’identification aux personnages vidéoludiques se révèle un phénomène complexe qui nuance l’importance de la représentation pour les joueurs et les joueuses et remet en question les arguments néolibéraux promouvant la pluralité des représentations au sein des jeux vidéo (au détriment de la diversité), mais également l’idée que puisque le public est soi-disant composé majoritairement d’hommes hétérosexuels, que les protagonistes doivent absolument leur ressembler pour qu’ils se sentent interpellés (Shaw, 2014). Nous proposons donc d’appréhender une posture épistémologique complémentaire aux études traditionnelles des représentations en jeu vidéo ainsi que de possibles méthodologies pour aller au-delà d’une seule analyse visuelle. Plusieurs enjeux méthodologiques et interrogations émergent de cette vision plus complexe des représentations. Il s’agit de les mettre en lumière et de les discuter afin de proposer des pistes de réflexion pour de futures analyses des représentations vidéoludiques.
Biographies
Jessica Benonie est docteure en sociologie et chercheure associée au LISST Cers (Université Toulouse 2). Ses travaux puisent dans divers champs de recherche : études genre, sociologie du numérique et ses usages. Son travail de thèse est à l’intersection de ces spécialités et porte sur les gameuses de jeux vidéo. Équipé d’une approche méthodologique multi située (entretiens, observations, ethnographie en ligne), il propose de suivre le quotidien de celles qui s’investissent dans un milieu encore largement dominé par les hommes. Il s’agit ici de montrer comment les femmes sont présentes à différentes échelles dans le milieu vidéoludique et d’identifier quels sont les mécanismes qui participent à leur invisibilisation. Toujours dans cette volonté de mettre en lumière des pratiques et des populations encore peu analysées en France, ses enquêtes actuelles suivent cette dynamique et interrogent les parentalités en ligne ou encore les loisirs des seniors.
Élodie Simard est doctorante en communication à l’UQAM. Dans ses recherches actuelles, elle conjugue son intérêt pour le féminisme à sa passion pour les jeux vidéo en s’intéressant notamment au sexisme et aux stéréotypes de genre dans la culture vidéoludique. Dans le cadre de son mémoire de maîtrise, elle s’est penchée sur les perceptions et les rapports qu’entretiennent les fans de la série de jeux Tomb Raider avec le personnage de Lara Croft.
Co-organisé par le LabSIC (Laboratoire des Sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris Nord, France) et le CRICIS (Centre interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, Québec, Canada), le séminaire Genre(s) et méthodes (GEM) s’attache à étudier les questions féministes, intersectionnelles et de genre(s) en termes de méthodes, méthodologies et épistémologies. Concept transdisciplinaire fluide et non figé, le genre – ou les genres, pour échapper à un fonctionnement social binaire – a fait l’objet de travaux qui, en proposant un décentrement radical, ont transformé le paysage des sciences sociales et humaines tout au long du XXe siècle. Ce séminaire a pour objectif de proposer un espace pour discuter des apports de ces études à la pratique scientifique.