Vidéo: Le genre et d’autres rapports de minoration en études télévisuelles

La première séance de la série de séminaires Genre(s) et méthodes co-organisé par le LabSIC (Laboratoire des Sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris Nord, France) et le CRICIS (Centre interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, Québec, Canada), intitulée Déconstruire le genre et d’autres rapport de minoration en études télévisuelles, a eu lieu le vendredi 12 mars 2021 entre 9h et 12h (15h-18h à Paris). Visionnez la séance ici.

Veuillez noter que pour des raisons de droits droits d’auteur, nous avons dû couper l’extrait de la série télévisuelle « Hubert et Fannie » de la présentation de la professeure Stéfany Boisvert.

Résumés des communications

Sarah Lécossais: Du genre à l’écran : méthodologies croisées pour analyser les représentations des rapports sociaux de genre dans les séries télévisées françaises.

Afin d’interroger les dynamiques de représentation du genre dans les séries télévisées, je propose de travailler aussi bien sur les contenus (analyse de corpus) qu’à partir d’entretiens avec des scénaristes. Après avoir rappelé ce qui m’a amenée à enquêter sur les objets longtemps méprisés que sont les séries françaises, je présenterai donc dans cette communication les enjeux de l’articulation de ces deux méthodologies et le développement d’une approche féministe des politiques des représentations (Hall, 2008). En termes théoriques, mes recherches s’appuient ainsi sur une conception du genre comme performance itérative (Butler, 2006) dont la représentation est la construction (de Lauretis, 2007). Les séries peuvent alors être entendues comme « territoires du genre » (Lécossais, 2020), via une relecture de Butler, de Lauretis, Foucault et Hall.

Biographie : Sarah Lécossais est maîtresse de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Sorbonne Paris Nord. Ses travaux portent sur les rapports sociaux de genre dans les séries télévisées : notamment sur les représentations de la parentalité dans les séries françaises (pendant sa thèse) et désormais via une enquête auprès de scénaristes de séries.  Elle est notamment autrice de l’article « Les séries télévisées, territoires du genre » paru en 2020 dans la revue Recherches féministes.

Stéfany Boisvert: Enjeux épistémologiques et méthodologiques d’une queerisation des études télévisuelles

Cette communication proposera une réflexion sur le potentiel de la théorie queer pour le renouvellement des études de genre (gender studies) portant sur la télévision. L’approche queer est ici définie comme une approche fondamentalement critique et anti-essentialiste qui vise à questionner, dénaturaliser, subvertir et problématiser les savoirs normatifs ainsi que les conceptions fixes et binaires des identités et sexualités (Sullivan 2003 ; Chambers 2009 ; Joyrich, 2014). Partant de cette définition, je montrerai comment l’approche des queer television studies permet de surmonter un écueil encore fréquent, soit celui d’une lecture « binaire » des représentations télévisuelles, tout en mobilisant plus concrètement une approche intersectionnelle. Afin de réfléchir au potentiel d’une queerisation des études télévisuelles, je ferai référence à certains de mes récents projets de recherche, lesquels avaient pour objectif d’analyser les représentations de personnages non-binaires et trans dans certaines séries télévisées récentes, mais aussi de mieux comprendre les mécanismes de réception reliés à l’inclusion de personnages LGBTQ+ dans des fictions télévisuelles. Ces recherches permettront ainsi d’aborder les enjeux épistémologiques et méthodologiques reliés à la mobilisation des queer studies, que ce soit dans le cadre d’une analyse qualitative de contenu ou d’une ethnographie en ligne.

Biographie : Dr. Stéfany Boisvert est professeure à l’École des médias de l’UQAM. Membre collaboratrice du Réseau québécois en études féministes (RéQEF) et du Centre de recherche interuniversitaire sur la communication, l’information et la société (CRICIS), Stéfany se spécialise dans l’étude de la télévision, de la sérialité, des nouvelles plateformes numériques et de la culture populaire, en s’intéressant plus particulièrement aux enjeux féministes, de genre et de diversité reliés aux nouvelles productions médiatiques et sérielles. Sa thèse de doctorat en communication portait sur la représentation de modèles de masculinité dans les séries télévisées nord-américaines contemporaines, selon une approche critique s’appuyant sur des travaux en études féministes et de genre. Entre autres projets, elle réalise actuellement une recherche sur la production de contenus originaux francophones sur les services de télévision par contournement au Canada, en questionnant entre autres la diversité sexuelle et de genre proposée dans ces nouveaux contenus audiovisuels. 

À propos de la série de séminaires

Co-organisé par le LabSIC (Laboratoire des Sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris Nord, France) et le CRICIS (Centre interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, Québec, Canada), le séminaire Genre(s) et méthodes (GEM) s’attache à étudier les questions féministes, intersectionnelles et de genre(s) en termes de méthodes, méthodologies et épistémologies. Concept transdisciplinaire fluide et non figé, le genre – ou les genres, pour échapper à un fonctionnement social binaire – a fait l’objet de travaux qui, en proposant un décentrement radical, ont transformé le paysage des sciences sociales et humaines tout au long du XXe siècle. Ce séminaire a pour objectif de proposer un espace pour discuter des apports de ces études à la pratique scientifique. Nous y discutons des façons de faire de la recherche lorsqu’on travaille sur le(s) genre(s), de ses / leurs articulations avec d’autres formes de minoration, et du pouvoir critique de cet outil pour désessentialiser le monde social. Cherchant à soustraire la réflexion à la pensée universaliste, nous y décentrons les regards pour aborder les questions de luttes, de résistances, à l’exemple de celles de corps racisés qui subissent différents rapports de domination. Nous réfléchissons à la façon dont sont opérés les décentrements des concepts et aux démarches mises en œuvre pour déconstruire les normes dominantes sur les identités de genre, les sexualités et d’autres rapports de pouvoir comme la classe ou la race. Pluriels, les questionnements portent sur la capacité à penser le positionnement de la chercheuse ou du chercheur, son engagement, sa subjectivité, le dévoilement de biais en termes de production ou d’interprétation de données, la réflexivité sur ces biais en tant que ressources heuristiques, épistémiques ou politiques, les questions éthiques soulevées par des objets perçus comme impurs, ou encore l’historiographie ou l’analyse du caractère genré d’un objet ou d’un dispositif d’enquête… Il s’avère pertinent de mettre au jour et d’analyser les façons dont le(s) genre(s) – ainsi que les concepts qui lui / leur sont rattaché(s) – sont travaillés et reconstruits par le terrain… Enfin, cet espace de dialogue a aussi pour vocation d’interroger la possible singularité des méthodes, méthodologies et épistémologies des approches par le genre et des études féministes et intersectionnelles. Ce séminaire met en lumière des travaux s’inscrivant dans les champs des médias et de la communication, et plus largement en sciences humaines et sociales (sociologie, histoire, anthropologie, sciences politiques ou philosophie…).  

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